Dans l'une de ses vidéos, MiKe Belieau déclarait que les fusils du type hawken n'avaient jamais tiré avec ce genre d'arme.
J'ai voulu en savoir plus et je me suis lancé dans quelques recherches sur internet dont je vous donne ici le résumé.
Jeremiah Johnson, dans le film du même nom, disait vouloir rechercher un fusil hawken calibre .50 mais n'en trouvait qu'un calibre .30 mais c'était un hawken.
La légende était née, les trappeurs, les mountain men américains parcouraient les montagnes rocheuses et les grandes plaines un hawken à la main, le meilleur fusil de son temps.
Mais qu'en est-il en réalité ?
En Amérique du Nord, le commerce des fourrures, essentiellement celle du castor connut son heure de gloire entre 1820 et 1840.
Au cours de cette période, cette pratique, jusque là plus ou moins individuelle, fut prise en mains par des entreprises commerciales, les compagnies de fourrures, regroupant plusieurs actionnaires et de nombreux « ouvriers », parmi lesquels on trouvait des noms qui allaient devenir célèbres : Jedediah Smith, Hugh Glass, Kit Carson, Jim Bridger...
Les dirigeants de ces compagnies recrutaient jusqu'à une centaine d'hommes qui remontaient en péniches ( keel boats ) le Missouri et ses affluents jusqu'au cœur des montagnes rocheuses. Là ils s'installaient parfois pour plusieurs années dans des établissements plus ou moins permanents d'où ils rayonnaient pour capturer les précieuses fourrures et explorer du même coup le pays. Il régnait au sein de ces compagnies une discipline quasi-militaire.
Cette période fut également celle des fameux « rendez-vous » où les trappeurs indépendants et les compagnies de fourrures pouvaient venir vendre leurs fourrures et se réapprovisionner en produits de première nécessité venus de Saint Louis ou de l'Oregon encore anglais.
La peau de castor servait essentiellement à confectionner des chapeaux. Cette mode tomba en désuétude au début des années 1840 où elle fut remplacée par celle des chapeaux de soie.
Au même moment le castor commençait à se raréfier et la trappe de cette pelleterie entama son déclin dans les montagnes rocheuses. Elle subsista encore quelques temps dans le sud-ouest des USA, autour de Taos mais de manière plus restreinte.
Le dernier « rendez-vous » eut lieu en 1840 et les derniers trappeurs se tournèrent vers de nouvelles activités.
Lors de leurs chasses, les mountain men avaient exploré et ouvert de nouvelles routes vers l'ouest, le cœur des montagnes rocheuses et les terres au-delà, la Californie, le grand lac salé, l'Oregon .
La fin de l'industrie du castor correspond à la parution du thème de la destinée manifeste, « GO WEST YOUNG MEN », qui entraîna la migration de centaines de milliers d'hommes et de femmes vers l'ouest du pays.
Les routes à suivre, piste de Santa Fé, piste de la Californie, piste de l'Oregon, avaient été celles ouvertes par les trafiquants de fourrures pour leurs convois de mules.
Quoi de plus normal qu'elles servent alors pour les chariots des pionniers, eux-mêmes guidés par ceux qui connaissaient le mieux le pays, qui avaient ouverts ces routes, qui en avaient exploré et reconnu le moindre recoin, le moindre danger.
Les trappeurs devinrent donc des guides, des « scouts », et pour certains des chercheurs d'or.
Le principe de la capsule à percussion fut inventé dans les premières années du XIXème siècle mais n'arriva aux USA que vers 1825 et n'apparut à Saint Louis qu'en 1831 et il fallut plusieurs années pour que son approvisionnement devienne régulier. En 1834, le silex était encore de rigueur chez les trappeurs car Nathaniel Wyeth précise qu'il « percussionna » ( percussionned dans le texte ) trois fusils pour compenser la mauvaise qualité de la poudre qui rendait les silex inopérants.
Le prix d'une arme nouvelle pouvait décourager des individus souvent à court d'argent mais munis d'armes anciennes et néanmoins efficaces.
Un hawken coûtait entre 20 et 40 dollars alors qu'un fusil de traite valait entre 3 et 4 dollars. Quant au salaire d'un mountain man, il était de 14 dollars/mois dans la compagnie de Nathaniel Wyeth.
Les types d'armes utilisées au sein de l'American Fur Company et de la Pierre Chouteau & Cie, fin 1830 – début 1840, ont été classés ainsi selon l'importance de leur utilisation :
1er, lancaster rifle,
2ème, english rifle,
3ème, kentucky ou pennsylvania rifle,
4ème, J&S hawken rifle ( encore ne s'agissait-il pas du hawken tel que nous le connaissons maintenant ),
5ème, new english rifle.
La famille Hawken est originaire du Maryland où elle fabriquait déjà des kentucky rifles. Plusieurs de ses membres travaillèrent pour l'arsenal de Harper's Ferry, en Virginie.
En 1820, Jacob Hawken s'installa à Saint Louis, d'abord en association avec James Lakeman, puis avec son frère Samuel après la mort de Lakeman en 1825.
Jacob mourut en 1849 et son frère continua seul jusqu'en 1855, année où il se retira des affaires qui furent reprises par son fils William jusqu'en 1857 ou 1860. Le magasin passa alors entre des mains étrangères à la famille.
L'établissement tenu par les frères Hawken était moins une armurerie qu'une quincaillerie puisqu'on y trouvait et fabriquait tout ce que l'ouest américain avait besoin en produits métallurgiques, outils divers, tomahawks, briquets, pointes de flèche, accessoires pour armes, poignées de sabres, et services comme la réparation d'armes, la maréchalerie. La production d'armes à feu ne devint l'activité principale qu'à partir de 1849.
Au début de leur activité, les frères Hawken forgeaient eux-même leurs propres canons et pièces détachées avant de les acheter tous faits, réduisant leur masse salariale et augmentant leur capacité de production.
Hormis le fusil commandé en 1823 par le général Ashley, qui serait l'archétype du hawken rifle, la première trace de commande d'une arme à feu date de 1831. 18 fusils furent vendus cette année là au profit de l'American Fur Company et encore 18 autres l'année suivante.
La production annuelle moyenne avoisinait les 120 armes avec un pic à 200 armes lors de la ruée de l'or de 1849.
Environ 3 000 armes à feu, principalement des fusils, furent vendues par le magasin Hawken de Saint Louis, 1 000 armes entre 1825 et 1840, au plus haut de la période de la fourrure, 2 000 armes entre 1840 et 1860. Ces chiffres sont à comparer au 100 000 armes à feu construits la famille Henry et les 100 000 à 250 000 fusils de la firme Leman.
Toute la production Hawken ne partait pas vers l'ouest et de nombreux fusils n'ont jamais quitté la vallée du Mississippi, vendus à des personnalités ou des chasseurs locaux, voire à un capitaine de bateau.
Le général William Henry Ashley, fondateur de la Rocky Mountain Fur Company, passe être à l'origine du fusil hawken.
En 1823, il passa commande aux frères Hawken d'un fusil dont on sait peu de choses. Il devait être à silex, tirait un projectile d'1 ounce ( 28g ), soit une balle ronde de calibre .66, et avait un canon rayé de 3 pieds et demi ( 106cm ).
Il pouvait ressembler au fusil du mormon John Brown Jr., un long rifle typique signé J&S Hawken également en calibre .66 mais à percussion.
Ce fusil devait servir à défendre les keelboats de la compagnie contre les attaques des indiens qui les harcelaient depuis les berges du Missouri. Il devait donc tirer plus loin et avec plus de précision que les armes de traite des tribus locales.
Il fallait un canon long et rayé pour permettre de développer une vélocité et une précision suffisantes pour un tir à longue distance.
Un canon octogonal offrait plus d'épaisseur et de résistance lors de l'explosion de la charge tout en réduisant le recul par son poids.
Une queue de culasse plus longue et des clavettes renforçaient la solidité canon-crosse.
Quelques caractéristiques de base du hawken étaient déjà posées.
Je n'ai trouvé aucune explication quant à la réduction de la longuesse, simplification du processus de fabrication, réduction des coûts, difficulté d'approvisionnement en pièces de bois suffisamment longues, renforcement du canon en acier doux, affaire de style ?
Le fusil hawken typique avec sa platine à percussion, son gros calibre, son canon octogonal, sa longuesse courte, ses clavettes pour maintenir le canon, sa queue de culasse longue ne se normalisa que vers la fin des années 1840.
En fait, le hawken est un plains rifle, un type de fusils en vogue aux USA de 1840 à 1860 et partageant ces mêmes caractéristiques voire les mêmes pièces détachées.
On trouve de nombreuses disparités de calibre ( .38 à .62 ), de longueur ( 1,20 à 1,50m ), de finition ( patchbox, bois, poignée pistolet, système de visée ). Les plains rifles ne furent pas l'apanage de la seule famille Hawken. De nombreux armuriers en construisirent, Tryon, Wurfflein, Henry&Son, Petty, Goulcher, Gilbert & Bales, Wilkes, Keller, Gemmer...
Le fusil hawken ne fut donc pas l'arme des mountains men et s'il fut celle des chercheurs d'or et des pionniers, ce fut de façon marginale. Mais il est devenu néanmoins l'une des arme les plus célèbres de l'ouest américain.
Cette célébrité, le hawken la doit autant à son efficacité, sa qualité de fabrication qu'à ses possesseurs célèbres ( Kit Carson, Jim Bridger, Galen Clark ) et le renom qu'ils acquirent dans les « dimes novels » et autres littératures populaires. Même les européens s'y mirent. Karl May, auteur allemand, arme en 1875 ses héros, Winnetou et Old Shatterhand, de fusils hawken.
Certains hawkens célèbres existent encore et sont parfois visibles.
Celui de Jim Bridger, un Samuel Hawken en calibre .54, canon de 84cm, fabriqué en 1850, est exposé au Montana Historical Society Museum de Helena.
Mais il possédait également un plains rifle en calibre .40, longueur totale 120cm, fabriqué en 1853 par W. Ogden, exposé au museum of the mountain man à Pinedale au Wyoming.
L'un des fusils de Kit Carson, également un Samuel Hawken en calibre .54, canon de 78cm, datant de la fin des années 1850, a été offert par son propriétaire à la loge maçonnique Montezuma de Santa Fé où il est toujours abrité.
Le Buffalo Bil center of the west, à Cody, Wyoming, exhibe quant à lui 10 fusils hawken, une donation de la famille Ruger.
Le national firearms museum présente pour sa part une collection de plains rifles issus de différents armuriers.
Bon tir à tous
Statetrooper